Auteur : Koushun Takumi Editeur : Le Livre de Poche Nombre de pages : 830 Prix : 8.60€ Parution : mars 2008 ♥ Coup de cœur ♥ Dans un futur proche, un empire asiatique indéterminé aux tendances fascinantes a mis en application le programme 'Battle Royale' pour servir d'exemple à la population - et tout particulièrement à sa frange la plus jeune. Ce programme consiste à tirer au sort chaque année une classe de collégiens et à les emmener de force sur une île isolée du monde, où au terme de combats acharnés, un seul d'entre eux pourra rester en vie – dans le cas contraire, tous périront. Une course contre la mort s'engage donc, durant laquelle chaque élève devra faire face à ses amis d'hier, et accepter sa nature profonde. Ma note : 5/5 J’avais entendu à plusieurs reprises des débats entre Hunger Games et Battle Royale, ceux- se ressemblant beaucoup (trop ?). Voulant me forger mon propre opinion, je me suis attaquée à ce lourd chef-d’œuvre. « Leur sang versé et leurs corps déchiquetés viendront sans aucun doute enrichir la terre de notre belle patrie. » Le contexte est glaçant. Dans cette fiction qui se passe au Japon, celui-ci mène une sorte de guerre froide contre l’Amérique. Ce pays est un régime totalitaire, reclus sur lui-même. Les habitants ont tout juste assez de libertés pour ne pas penser à la rébellion. Chaque année, cinquante classes de 3e participent au Programme. Elles sont, chacune, envoyées sur une île, où les élèves devront s’entre-tuer. Il n’y a qu’un seul gagnant. Le jeu cherche à prouver que la confiance n’existe pas et n’existera jamais. Ainsi, le gouvernement japonais annihile tout mouvement de révolte avant même qu’il ne puisse se former. Comment créer un coup d’Etat quand chacun doute de l’autre ? Ce but, bien sûr, n’est qu’officieux. L’officiel est que les réactions et cadavres sont soigneusement étudiés, à des buts militaires. « Sa tête était sur le point d’exploser – au sens figuré, cette fois. » Koushun Takumi a une plume réaliste et poignante. Il détaille tout, toujours conforme à la réalité. La mort, notamment. Sous une forme écœurante, déchirante. Cruelle et saisissante. Aussi, il nous donne beaucoup d’informations sur chaque personnage pour que l’on puisse le comprendre. Ce qui peut parfois être dur à suivre, particulièrement au début. L’auteur nous plonge ainsi dans différents et assez nombreux personnages, grâce à différents points de vue internes par lesquels l’auteur nous permet de suivre tout le monde à la fois. De nous attacher à eux. Pour mieux nous enfoncer lorsqu’il leur donne la mort. Sa plume est aussi teintée de touches d’humour. Noir, bien sûr. Mais ce cynisme reflète totalement la détresse que les personnages tentent de noyer dans des railleries cruelles et désabusées. Mention spéciale pour les fins de chapitres, qui tiennent tout particulièrement en haleine. Impossible de s’arrêter, il faut tourner la page. Et ce petit encadré avec le nombre d’élèves restant dans la partie est plutôt glauque. Horriblement, même. Avec ses descriptions remarquables et ses changements incessants de points de vue, Battle Royale n’est pourtant pas un roman lourd. Au contraire, il nous entraîne, nous envoûte, nous emporte dans son récit pleine de cruauté et de sollicitude. Entre ironie féroce, meurtres sanglants et amours entremêlés par un auteur virtuose, on se cramponne au fil taché de rouge de l’histoire, vertigineuse. « Aujourd’hui, mes petits amis, vous allez vous amuser à vous entre-tuer. » Au cours du roman, nous suivons la classe de 3e B du collège de Shiroiwa, faisant partie des malheureux sélectionné du tirage au sort. Composée de 42 élèves, les noms sont difficiles à mémoriser et à mettre sur les personnages, même si au fur et à mesure on les retient. A chaque instant, la mort peut frapper. Une idée que l’auteur passe brillement et avec lucidité. Au fil des pages, jamais on ne connaît à l’avance le nom des futurs cadavres. Jamais. Elle survient à sa guise, toujours. Tranquillement, elle arrive, s’approche, frôle, repart, revient et s’ensuit. L’auteur nous prend au dépourvu, fait danser des figures imprévisibles à ses marionnettes que sont les personnages. Il les manie avec dextérité et les entraîne dans les coins les plus improbables, puis les fait tout à coup surgir, attendant impatiemment notre visage ébahi. « La paix régnait dans la classe des 3e B et tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. » Dans cette classe figure aussi un enchevêtrement de liens amoureux, réciproques ou à sens unique. La troisième est un moment de la vie où Cupidon aime en effet lancer ses flèches. Et bien que virulent, l’histoire est aussi celle d’adolescents. Peu à peu, on découvre donc les amours des uns pour les autres, et l’acharnement que chacun a pour retrouver l’être aimé. Souvent doux et sincère, il se manifeste aussi sous des formes plus violentes, cachées. De belles amitiés se crées aussi, pures et confiantes. Tout comme d’autres, pleines de méfiance et de fragilité, qui tournent rapidement à l’autodestruction. Autant de personnages gentils que manipulateurs, blessés qu’ingénieux. Certains touchants, d’autres impitoyables. Tour à tour cruels et effrayés. Traqués par la panique, soulagés par les rires d’amis. Takumi fait passer ses pantins d’un extrême à l’autre, pas assez indulgent envers leur cœur. L’auteur vise beaucoup le ressenti des personnages, leurs pensées perdues, leurs souvenirs qui ressurgissent. Mais aussi leur désarroi dû au jeu, leur crainte des autres, leur hésitation à la confiance, leur crainte d’être trahi. Un côté moral qui subjugue, qui nous fait nous interroger. Et si j’étais à leur place ? Un roman cruel, prenant et révoltant. Entre meurtres, amour, ingéniosité et amitié, un jet de questions nous interpelle. Un coup de cœur, tout simplement.
10 Commentaires
Celui-dont-on-ne-peut-pas-prononcer-le-nom
11/11/2015 18:26:56
Il me donne trop envie maintenant !
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Une plume mélodieuse
11/11/2015 18:31:52
Il FAUT que tu lises ce livre. Il gère tellement !
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Antoine
11/11/2015 18:28:34
Désolé mais tu ne pourrais décidément pas me faire changer d'avis :(
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Une plume mélodieuse
11/11/2015 18:29:34
T'es trop buté ://
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J'ai faim
11/11/2015 20:46:23
Je suis désolée Marine, mais 830 pages c'est beaucoup trop long pour moi à part s'il y a des images toutes les 2 pages et que c'est écrit dans une police de taille 30 :) mais sinon tes chroniques sont toujours géniales :)
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11/11/2015 21:09:27
(Bah mange)
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15/11/2015 12:15:35
J'espère que tu le liras !
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1/12/2015 15:34:55
Quelle belle chronique ! Je n'ai vu que le film (pas trop aimé), mais ton avis et le fait que ce soit un coup de coeur laissent songeur.
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Une plume mélodieuse
6/12/2015 21:20:44
J'espère que tu le liras, ce livre est vraiment renversant !
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